De toutes les sensations, celle de n’en avoir aucune est la plus étrange. Un néant dévorant, pas la moindre once d’envie, d’ambition, d’émotion. Un vide absolu, comme si rien n’avait de but aucun.
Témoignages
Torture Thérapeutique
L’hôpital psychiatrique. On ne m’a pas tellement laissé le choix. Mais au-delà de comment ai-je fini par y mettre les pieds, la question est surtout de savoir l’état dans lequel ont fini lesdits pieds, une fois sur place.
Cachou
TW : mort d’un animal
Cachou, c’est le nom qu’on lui a donné. Un petit oiseau, trouvé perdu sur la rue principale. Un choucas des tours. Il n’allait pas bien. Pas tombé du nid. Pas en exploration en attendant que sa mère vienne le chercher. Non. Blessé. Presque mort. Effrayé. On l’a pris, on l’a emmené chez nous.
Les yeux qui se soulignent
Tout le temps, il y a eu les yeux. Moi et pas moi à la fois. Ils m’ont regardée, m’ont questionnée, m’ont demandé si ce que je vivais était réel. Et longtemps je n’étais pas sûre de la réponse.
Chaos banal
On arrache le chèque à pleines dents, la sueur encore perlante à nos fronts et on court à l’orée. On oublie vite l’odeur du feu et des effluves se mêlant au cri de nos cercles antérieurs.
De vi(d)e
Ils ont leur jolie droite sur le bitume, discontinue, prétracée du sang de leurs ancêtres. Alors je regarde mes jalons, un à un, et chacun semble inatteignable. Si je n’avance pas, si je n’ai ni projet ni ambition, c’est car je suis déjà morte. Le genre de phrase qu’on écrit sur son agenda au collège. Le corps a déjà cédé, dans ma tête, il ne reste plus qu’à coucher le dessin.
Le plus vieux des suicides
On était une bande de gamin-e-s et on ne s’appréciait pas tout-e-s nécessairement, mais on finissait inéluctablement par se recroiser à chaque événement de village puisque dans ce genre de patelin, tout le monde se connaît plus ou moins. Lire la suite
Monsieur T.
Monsieur T.,
J’ai été élève d’une de vos classes, il y a de cela des années. Cinq ans, six ans, peut-être plus. Pendant longtemps, vous et vos cours d’anglais un peu particuliers m’ont beaucoup fait rire. Pour nous faire apprécier la langue, vous redoubliez d’imagination et nous étudiions un jour South Park, un autre une chanson choisie par un élève, un autre encore des formes d’art un peu particulières.
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Haut les mains
[Pour les personnes s’apprêtant à lire ce qui suit, une mise en garde : le texte contient de la violence physique et psychologique sur mineure]
Il est amusant de constater la facilité qu’ont les gens à se bander les yeux. Ma famille d’abord, préférant me voir encaisser que de se brouiller avec mon père. Ma mère ensuite, me répétant qu’il avait un bon fond et que la responsabilité me revenait en partie. Et encore aujourd’hui mes collègues, feignant de ne pas comprendre pourquoi je me refuse au maximum à retourner chez mes parents depuis que j’ai décroché mon indépendance. Jusqu’à la culpabilisation parfois. Mes parents jouissent d’une immunité, comme tant d’autres, et il semblerait que je leur doive quelque chose. Je reste persuadée qu’iels préfèrent que je ne leur retourne pas la politesse.
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Le bruit SOURD
Le bruit sourd est dans ma tête. Peut-être n’existe-t-il même pas. Mais il est là. Le bruit sourd se manifeste telle une surcharge, comme la conséquence d’un surplus d’informations. Mon oreille, d’habitude distraite, vole successivement sur les autres tables du restaurant. Elle se lie à chaque visage, chaque groupe, chaque mot. Elle entend sans écouter, et les conversations n’ont aucun sens.
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